Suite aux révélations fracassantes sur le corona business, la responsabilité du ministre de la Santé et de l’Action sociale est interpellée au premier chef. Abdoulaye Diouf Sarr serait-il dépassé par la situation catastrophique de la pandémie ?
C’est le Dr Babacar Niang, médecin-Chef de Suma Assistance, qui vient de jeter un pavé dans la mare déjà gluante du ministère de la Santé et de ses services en cette période critique où le Sénégal vit les effets désastreux du variant Delta. « Du matériel du public est vendu aux structures sanitaires du privé. La maison de Serigne Mboup (CCBM), et d’autres revendeurs qui ont pignon sur rue, te sortent tout le matériel que tu veux. Ce n’est pas normal. Tout ministre de la Santé qui vient, la première recommandation qu’on lui fait, c’est de ne pas soulever ce lièvre », a-t-il révélé sur le plateau du Jury du dimanche. De telles révélations émanant d’une voix autorisée de la trempe de ce professionnel, membre de l’Ordre des médecins, est un camouflet pour le ministre de la Santé dans cette chaine du corona business.
Frappé de plein fouet par cette 3éme vague du coronavirus escortée d’un variant foudroyant et meurtrier, le Sénégal se demande ce que fait son ministre de la Santé et ses services dédiés. Le Comité national de gestion des épidémies (CNGE) semble avoir atteint ses limites au moment où tous les professionnels du milieu s’accordent à dire qu’il faut un nouveau cadre scientifique indépendant pour donner les bonnes analyses, les bons chiffres et les bonnes informations aux autorités. Classé 2eme mondial pour sa gestion de la pandémie lors de la première vague, le Sénégal est aujourd’hui l’un des rares pays africains à être aussi touché sévèrement par cette troisième vague. Que fait le ministre de la Santé et de l’Action sociale ? Engagé dans une campagne de vaccination nationale, Abdoulaye Diouf Sarr semble vouloir apporter des réponses conjoncturelles au virus Delta.
Attendu sur des solutions structurelles et des réponses à long terme sur cette 3éme vague, Diouf Sarr y va de son rythme depuis le début de la pandémie au point de diviser le secteur : le satisfecit médical décerné au Sénégal après la première vague a révélé paradoxalement les failles du système sanitaire local. Sans compter la défection de médecins de premiers plans qui avaient tenu la barque lors des première et seconde vague et qui, pour différentes raisons, ne sont plus d’accords avec la politique sanitaire du ministère de tutelle en ces temps de crise. Chef du service des maladies infectieuses de l’hôpital Fann, le Pr Moussa Seydi n’a pas encore jeté l’éponge comme son collègue, le Dr Abdoulaye Bousso, ancien Directeur du centre des opérations d’urgence sanitaire (Cous). Mais ses différends profonds avec le ministre Diouf Sarr sur la politique de riposte face à la pandémie est un secret de polichinelle. Ayant habitué les Sénégalais à déconstruire systématiquement les recommandations du spécialiste qu’est le Pr Seydi, le ministre de la Santé et de l’Action sociale donne l’impression de mener un faux combat contre tous ces professionnels du secteur qui n’entrent pas dans ses grâces parce que prenant le contrepied des discours officiels et établis. En coulisses, il se dit que son chef, le Président Macky Sall, admirateur du Pr Seydi, se montre de plus en plus agacé par cette mauvaise publicité faite au Sénégal.
Tous les spécialistes sénégalais s’accordent sur ça : face au taux de létalité du variant Delta, l’urgence du moment s’oriente vers les lits de réanimation, la réouverture des CTE (Centres de traitement des épidémies), la démocratisation du matériel d’assistance respiratoire pour le plus grand nombre et la décentralisation des soins pour une proximité avec les populations. Abdoulaye Diouf Sarr est-il censé ignorer cette réalité ?
